Femminile Plurale

Femminile Plurale: cinéastes italiennes 2010–2021

Cette sélection de films issue d’un projet rétrospectif de Cinecittà, intitulé «Femminile Plurale», permet de poursuivre la réflexion sur le cinéma des femmes entamée en 2022 avec le cycle « Pionnières du cinéma suisse ». Ilaria Ravarino explique ainsi le titre du projet : « Féminin (Femminile), parce que le genre compte. Pluriel (Plurale), parce que la différence, on la fait ensemble ».

Cela avait pourtant bien commencé: l'une des premières réalisatrices de l'histoire du cinéma était une Italienne, Elvira Notari. Elle a tourné quelque 60 longs métrages entre 1906 à 1929. Ensuite, pendant une large partie du XXe siècle, seules deux cinéastes italiennes, Liliana Cavani et Lina Wertmüller, ont connu une carrière cinématographique internationale. Il faudra attendre au moins un siècle pour que déferle une vague de cinéma italien au féminin. Car avant 2010, il était difficile de trouver la même année deux films réalisés par des femmes. En 2010, sur 122 films italiens sortis en salle, c’était le cas de seulement deux d'entre eux. Dix ans plus tard, en 2019 et 2020, on en compte 13 %. Les chiffres sont encore faibles, mais c’est quand même six fois plus, sans compter les longs métrages qui ne sont pas sortis en salle, les documentaires et les courts métrages.

Susanna Nicchiarelli et Alice Rohrwacher sont les premières à briller sur la scène internationale et sont passées, au cours d’une décennie, de budgets de films indépendants à des financements bien plus importants. Au fil du temps, la vague a pris de l'ampleur avec de nombreuses auteures, telles que, entre autres, Elisa Amoruso, Laura Bispuri, Giorgia Cecere, Emma Dante, Maura Delpero, Valeria Golino, Laura Luchetti, Silvia Luzi, Chiara Malta, Michela Occhipinti, Valentina Pedicini, Paola Randi ou encore Adele Tulli.

Le cinéma italien au féminin est davantage un cinéma d'auteure. Ses formes sont plus artistiques et il y a davantage de liberté. Mais il peut aussi y avoir une autre explication: pour les premières et deuxièmes œuvres, ce sont souvent des films qui coûtent moins cher. Car personne encore en Italie – sauf à de rares exceptions – n'a investi dans la production et la promotion de films plus commerciaux, familiaux ou de Noël réalisés par des femmes. C'est un cinéma de niche, mais sans marché. Pourtant, une brèche s'est récemment ouverte: Paola Randi a tourné un film de Noël en 2021. Peut-être parce qu'on y parlait de la Befana et non du père Noël, mais peu importe.

Tout cela nous fait comprendre que, dans cette dernière décennie, le cinéma italien au féminin vit un moment unique, le début du début. Les auteures ne sont plus des cas isolés, mais elles ne font pas pour autant la tendance. Elles ne sont pour l'heure qu'une projection vers l'avenir qu'il faut raconter, avant que ces productions ne soient considérées, comme cela arrive trop souvent, comme des classiques. Ces réalisatrices sont là, elles proposent leurs histoires aujourd'hui et elles devraient être reconnues sans qu'il faille attendre que l'histoire du cinéma leur accorde le mérite d'avoir ouvert la voie aux femmes dans le cinéma italien.

Carla Cattani, responsable de la promotion internationale du cinéma contemporain à Cinecittà

Les autres films de la rétrospective

En marge de la première de Piccolo corpo de Laura Samani, la Cinémathèque suisse propose une rétrospective de films réalisés entre 2010 et 2021 par des cinéastes italiennes. Présentés par réalisatrice et par ordre alphabétique, ils témoignent d’un élan cinématographique d’abord marginal, qui a fini par devenir assez important, pour enfin constituer la première vague féminine du cinéma italien contemporain. Primée dans les festivals les plus importants, cette filmographie est traversée de récits insolites, engagés et hautement symboliques.