Sorties et ressorties
Des films contemporains réalisés par des cinéastes incontournables et des classiques récemment restaurés projetés sur plusieurs semaines.
Avec la réouverture du Capitole, la programmation de la Cinémathèque suisse connaît quelques changements. En sus des intégrales, rétrospectives, cycles et rendez-vous réguliers, une sélection de films vient désormais enrichir l’offre cinématographique avec des titres qui suivront une logique de programmation différente. Ceux-ci seront en effet tenus à l’affiche et bénéficieront de multiples projections sur plusieurs semaines. Cette nouvelle offre proposera à la fois des films contemporains, provenant de festivals et réalisés par des cinéastes incontournables, mais également des classiques ayant bénéficié d’une restauration récente.
Une mission de valorisation essentielle, dont celle du cinéma helvétique, qui l’est d’autant plus à l’heure où les œuvres souffrent d’une fenêtre de plus en plus petite lors de leur exploitation en salles. Ces «sorties» (pour les films récents) et «ressorties» (pour les films du patrimoine) étayent ainsi la diversité du programme tout en faisant se croiser et dialoguer les talents du panthéon avec les cinéastes contemporains.
Biographie(s)
Rithy Panh
Né en 1964 à Phnom Penh au Cambodge, Rithy Panh est interné à l’âge de 11 ans dans l’un des camps de réhabilitation par le travail dirigés par les Khmers rouges. En 1979, il parvient à s’échapper et rejoint un camp de réfugiés en Thaïlande. Un an plus tard, il s’installe en France et, en 1985, il entre à l’Institut des hautes études cinématographiques (IDHEC). Traumatisé par le massacre par les Khmers rouges de 2 millions de personnes en quatre ans parmi la population, soit une personne sur quatre, il dédie depuis la majorité des films qu’il réalise à son pays d’origine. «Sans cette guerre, dit-il, je ne serais jamais devenu cinéaste. Je témoigne pour rendre aux morts ce que les Khmers rouges leur ont volé. Je suis un passeur de mémoire en dette vis-à vis de ceux qui ont disparu».
Biographie(s)
Grégoire Colin
Né en 1975 à Châtenay-Malabry, Grégoire Colin débute à 12 ans au théâtre de Gennevilliers dans Hécube d'Euripide aux côtés de son père Christian Colin et de la comédienne Maria Casarès. Il poursuit dès lors une carrière en autodidacte, fait sa première apparition au cinéma en 1989, puis est nommé au César du meilleur espoir masculin en 1993 pour son rôle dans Olivier, Olivier d'Agnieszka Holland. C’est sa rencontre avec Claire Denis, en 1994, qui marque selon lui «un avant et un après» et lui permet d'affirmer sa place dans le paysage cinématographique français. Il devient l'un de ses acteurs fétiches, tournant dans neuf de ses films, de Nénette et Boni (pour lequel il a obtenu le Prix d'interprétation au Locarno Film Festival) à Feu! en 2021.
Evénement(s)
Mardi 1 octobre à 20:30
Interroger l’Histoire et le reflet qu’elle nous renvoie
Il s’agissait à la fois de parler des Khmers rouges, mais aussi d’interroger le rôle du journaliste de terrain, qui tend à disparaître. Aujourd’hui, on est davantage dans l’immédiateté, on travaille sur les dépêches, et non sur le fond. Les rédactions sont plus réticentes à envoyer quelqu’un sur le terrain pour trois ou quatre semaines. Le film fait écho à cette actualité et rappelle combien l’absence d’information, la désinformation ou la manipulation de l’information – qui sont des stratégies pour certains gouvernements – constituent un danger, un étau dans lequel nous sommes pris. Hier comme aujourd’hui. Même s’il est centré sur un passé khmer rouge révolu, le film évoque également l’actualité d’idéologies radicales qui excluent, qui renferment et qui refusent la confrontation des idées. Il évoque cette résurgence des utopies qui prétendent penser et agir pour le bien de tous, mais qui glissent vers une quête de pureté, une quête qui dévoie la révolution humaniste. Il dénonce cet édifice de la pensée poussé jusqu’à l’absurde dont les effets sur les humains sont effarants. Comme si on ne pouvait pas changer d’avis, faire marche arrière, ou simplement faire une pause pour réfléchir.
Rithy Panh